Le Salon mauritanien des arts plastiques se réfère, vous l’aurez compris, au Salon de peinture et de sculpture qui était une manifestation artistique qui se déroulait à Paris depuis le XVIIIe siècle, et qui exposait les œuvres des artistes agréées par l'Académie des beaux-arts de l’époque.
Si vous me le permettez, je ferai un bref historique du Salon de peinture. Petite histoire française très riche d’enseignements.
Le Salon de peinture est aux XVIIIe et XIXe siècles l’exposition magistrale qui regroupe les artistes importants de l’époque, faisant alors de Paris un point de passage obligé si ce n’est même la capitale internationale de la peinture.
Le Salon devient peu à peu le lieu de découverte des nouveaux courants esthétiques. Je pense à quelques temps forts parmi de nombreux autres :
- En 1819 (petite anecdote en clin d’œil à la Mauritanie), on y retrouve en premier vernissage « Le Radeau de la Méduse » de Géricault
- Douze ans plus tard « La Liberté guidant le peuple » d’Eugène Delacroix.
- En 1859, la Société française de photographie présente les premières images mécaniques qui pousseront Baudelaire à écrire sa célèbre diatribe contre ce qui lui paraît être une substitution de l’art par l’industrie.
C’est qu’à travers toute son histoire, le Salon est cerné par des enjeux corporatistes et esthétiques multiples, poussant les uns à s’opposer au jury de sélection et par là même à l’Académie puis à l’Institut des beaux-arts, et les autres à commencer à organiser des expositions parallèles. Alors que pour d’autres encore, à l’instar de Jacques-Louis David, la manifestation constitue un terrain tactique de prédilection.
Les remous polémiques auront pour aboutissements la création par Napoléon III du bien connu Salon des refusés (parmi lesquels Manet, Pissarro et Courbet), divers remaniements successifs du mode de sélection (dont l’absence de jury en 1848) et le désengagement de l’État en 1881. Ce qui mènera par la suite des associations d’artistes de plus en plus nombreuses à se revendiquer de la manifestation disparue.
Et c’est à ce moment-là aussi que la critique d’art apparaît pour la première fois en tant que genre littéraire. Avis aux journalistes… je pense aux textes sur Chardin de Denis Diderot écrits au Salon de 1763. « O Chardin! Ce n’est pas du blanc, du rouge, du noir que tu broies sur ta palette : c’est la substance même des objets, c’est l’air et la lumière que tu prends à la pointe de ton pinceau et que tu attaches sur la toile. C’est que ce vase de porcelaine est de la porcelaine ; c’est que ces olives sont réellement séparées de l’œil par l’eau dans laquelle elles nagent ; c’est qu’il n’y a qu’à prendre ces biscuits et les manger, ce verre de vin et le boire, ces fruits et les peler »
Après la Seconde Guerre mondiale se créent encore des Salons autogérés par les artistes : le Salon de Mai, le Salon des réalités nouvelles, le Salon de la Jeune Peinture, le Salon du dessin et de la peinture à l'eau, le Salon des Peintres témoins de leur temps, ect.
Avec l'arrivée au pouvoir, fin 1958, du général de Gaulle et de son ministre des Affaires culturelles André Malraux les Salons deviennent de facto le principal espace de liberté artistique, donc de contestation de l'art « officiel ».
Le concept même de Salon, en tant que lieu de présentation d’œuvres de peinture et de sculpture, perd progressivement son sens artistique pour être supplanté par un sens plus commercial. Apparaissent alors Biennales d’art (Venise mais aussi celle de Dakar, celle de Bamako..), mais aussi les Foires comme la Foire de Bâle, l’Armory Show à New York, la Fiac à Paris ect.
Mais revenons à Nouakchott. J’ai constaté très vite (je suis arrivé ici en septembre 2011) l’absence d’un grand rendez-vous annuel pour les artistes plasticiens. Il y a bien un Festival de cinéma avec la Senaf ou Nouakshort Film, il a aussi en musique le Festival Assalamalekoum, le Grand marché (bientôt en décembre) pour valoriser le travail des artisans d’art, mais rien pour nos artistes peintres. Alors j’ai proposé à l’UAPM, il y a maintenant un an exactement, d’organiser à l’IFM le Salon.
Ouvert au public, ce Salon doit devenir le rendez-vous du monde de l'art et l'un des événements majeurs de la vie artistique à Nouakchott. Son histoire permettra de comprendre l'évolution des courants artistiques, la formation du goût du public, la création et le développement de la critique d'art. Nous serons critiqués, le Jury contesté, les artistes hués, mais qu’importe. L’important est de donner la parole aux artistes qui nous aident chaque jour à aimer la vie. L’artiste Robert Filliou, pour qui l'art et la vie détiennent des philosophies confondues, disait en effet que « L'art est ce qui rend la vie plus intéressante que l'art. »
Bref et pour conclure, en définitive, j’espère que ce Salon permettra d'observer et d'analyser l'histoire des arts plastiques en Mauritanie pour les années à venir !
ATTENTION, je vous donne rendez-vous le 25 novembre à 19h00 précises pour annoncer les 2 lauréats de ce premier Salon des arts :
Le premier lauréat du prix du jury, le prix « Marie-Françoise Delarozière » (en hommage à son amour pour l’art mauritanien) choisi par un jury en présence de Philippe Piguet, critique d’art français (de la revue L’œil) et historien de l’art. Je vous invite d’ailleurs à assister aux 2 conférences qu’il donnera à l’UAPM sur l’histoire de l’art depuis la seconde guerre mondiale le 25 novembre à 11h00 puis le 26 novembre à 14h00.
Le Deuxième lauréat, c’est vous qui allez le choisir. Vous avez pour cela à votre disposition, des bulletins de vote que vous déposez dans l’urne verte durant tout le temps de l’exposition.
Rendez-vous le 25 novembre à 19h00.