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Bakhan, héraut mauritanien

bakan_ndiaye_cheikh.jpgA 29 ans, le chanteur Bakhan, finaliste du prix RFI en 2009, sort son premier album autoproduit, Ndeysan. Entre galères et foi inébranlable dans sa musique, le jeune Mauritanien mêle les influences pour partager la culture de son pays.

A RFI Musique, nous avions rencontré le chanteur mauritanien Bakhan en 2009 dans l’air glacial d’un mois de novembre parisien. Il était alors finaliste du prix Découvertes RFI et avait séduit le jury de sa voix puissante, riche en couleurs et en générosité, posée sur une musique aux horizons larges.

Deux ans plus tard, le même froid polaire n’entame pas le sourire ensoleillé du jeune trentenaire qui râle, un peu, quand même : "Ça caille, chez vous !"

En ce mois de janvier, l’artiste vient tout juste de sortir un premier disque autoproduit, Ndeysan, dont les ébauches conçues à Dakar, il y a trois ans, prirent leur forme définitive dans un studio d’enregistrement de la région parisienne.

Car depuis sa participation au concours RFI, Cheikh Abdoulaye N’Diaye (son surnom, Bakhan, signifie "la bonté" en wolof) a quitté la terre africaine pour emménager dans la capitale française. Pour l’amour d’une dame, d’abord. Par goût du nomadisme, ensuite. Pour raisons professionnelles, surtout.

"Paris, c’est LE milieu, en terme de producteurs, de distributeurs... A Nouakchott, il n’existe aucune infrastructure. La sphère musicale, très restreinte, se résume à une poignée de salles et de musiciens. Ici, règne une saine émulation et une variété infinie de styles musicaux. Ça booste mon art, ça nourrit mes envies !" Mais loin de l’eldorado ou d’une quelconque terre promise, Bakhan déchante vite.

En Afrique, l’entourage, la famille et le coût de la vie... lui laissaient tout loisir de tisser ses notes et harmonies. A Paris, sa vie s’assimile à un combat. La musique seule ne suffit pas à subvenir aux nécessités quotidiennes. Alors, à côté de ses compositions/répétitions, Bakhan enchaîne les missions d’intérim comme manutentionnaire. Dans son regard doux, passe, fugace, l’ombre de la lassitude. "Si je risque d’y laisser ma musique, je plie bagage et je rentre chez moi... C’est ce que j’aime, c’est toute ma vie, que ça plaise ou non."
 

Emotions

Pourtant, ce 21 janvier, sur la petite scène de l’Olympic Café, au cœur du quartier africain de la Goutte d’Or, à Paris, les affres et autres incertitudes s’oublient vite. Rayonnant, Bakhan tourbillonne, balance de l’énergie au kilo, fait grimper la température et le tempo. Ndeysan, le nom de son disque, signifie, approximativement, en wolof, "l’émotion", et Bakhan surfe sur toutes ses gammes : la colère, la joie, l’espoir, la tristesse...

Le jeune chanteur hante étonnamment sa musique, sa voix module à l’infini, et sa chaleur contagieuse galvanise le public. Car, chanté en trois langues (wolof, peul, hassanya), le credo de Cheikh, issu de quatre ethnies différentes, reste le partage. Sa musique, d’abord, s’impose comme une somme d’influences rencontrées sur la route, bandes-sons des lieux où l’ont porté ses pas, ses voyages, ses résidences : Cameroun, Tchad, Sénégal...

Avec des chatoiements de blues mandingue et de mbalax, la source principale de ce syncrétisme reste pourtant le son mauritanien : "Une façon particulière de jouer le blues, la soul... Contrairement à la musique malienne ou sénégalaise, celle de mon pays n’a jamais réussi à sortir de nos frontières. Trop traditionnelle". Avec sa voix, Bakhan s’est donc donné pour mission de moderniser le chant mauritanien, de l’offrir au plus grand nombre.

En témoigne ainsi l’utilisation de la guitare, instrument universel, qui adopte ici les notes égrenées de la kora, ou le jeu des tablas indiens. Dans cette communion revendiquée, Bakhan accepte d’ailleurs une certaine forme de spiritualité. Sur la pochette de son album, l’artiste adopte les postures d’une prière, un geste simple, mains jointes, que l’on retrouve chez les chrétiens, les musulmans, les bouddhistes...

Un certain combat


Mais par-delà sa mystique, Cheik affirme aussi son combat, son militantisme : "Dans le morceau Yehou, qui appelle au réveil, je pointe les problèmes d’accès à l’eau... Je n’attends pas de miracles de la part de nos dirigeants, mais un minimum, qui concerne la santé". Enfin, dans la longue liste de dédicaces qui parcourt le livret du disque, Bakhan finit sur celle-ci : "A Mon Pays". "Cette terre, je l’aime, et pourtant en Mauritanie, les jeunes ne trouvent pas la place qu’ils méritent. Dès lors que tu possèdes une activité créative, tu pars au Sénégal", raconte Bakhan.

"Hors des frontières, il est même plus rentable pour certains de dire qu’ils sont sénégalais, une culture plus reconnue... Ils fuient jusqu’à leur propre identité parce qu’en Mauritanie, rien ne bouge". Au-delà de la simple réussite de son disque et de son parcours, Bakhan fait donc le vœu que son pays s’unisse, et que sa musique, riche et variée, résonne loin.

 

Source: Radio France Internationale (RFI) 

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